Hyperthyroïdie




C’est un mot un peu effrayant, lié à un organe dont le fonctionnement reste souvent obscur et qui désigne une pathologie dont on ne connaît souvent pas grand-chose : l’hyperthyroïdie. Promis, en réalité, cette maladie est plutôt simple à comprendre, et on sait bien la soigner ! L’hyperthyroïdie est en effet tout simplement une maladie liée à un organe nommé “thyroïde”, qui se met à produire trop d’hormones et à “affoler” le fonctionnement du corps, provoquant un épuisement, une perte de poids, une sensation de fébrilité… Les médecins généralistes de Nabla Mariama Bah et Jean-Pierre Leroy ainsi que Laetitia Willerval, nutritionniste-diététicienne vous expliquent tout ce qu’il faut savoir sur cette pathologie.
Qu’est-ce que la thyroïde ?
La thyroïde est une glande (c’est-à-dire un organe qui produit des hormones) située dans le cou, et dont le rôle est d’une importance cruciale dans le fonctionnement du corps humain. En effet, les hormones sécrétées ont une influence directe sur le coeur, le foie, le métabolisme, l’humeur, le poids, la solidité du squelette, le développement du cerveau chez le foetus et l’enfant, la température corporelle, le transit intestinal… et la liste est encore longue !
La thyroïde fabrique deux hormones, qu’on appelle la T3 et la T4. Ces hormones se fixent sur les organes un peu partout dans le corps et leur envoient des signaux pour leur indiquer comment fonctionner. En temps normal, la machine est bien rodée et la thyroïde sait ajuster sa production d’hormones aux différentes situations par lesquelles le corps passe (sommeil, maladie, grossesse, adolescence, digestion…). Malheureusement, il peut arriver que la thyroïde cesse de fonctionner correctement, et se mette à sécréter soit trop d’hormones (auquel cas on entre en hyperthyroïdie), soit pas assez (hypothyroïdie).
Qu’est-ce que l’hyperthyroïdie ?
Si vous souffrez d’hyperthyroïdie, cela signifie que votre thyroïde est en sur-activité et produit trop de T4 et de T3, ce qui va avoir pour conséquence de fatiguer votre corps, et notamment votre coeur.
Quels sont les symptômes de l’hyperthyroïdie ?
L’influence de la T4 et de la T3 produites en excès va avoir pour effet de faire tourner le corps constamment à plein régime, d’épuiser l’organisme. Parmi les symptômes qui peuvent faire penser à l’hyperthyroïdie, on relève donc :
- Une perte de poids inexpliquée, alors que l’appétit reste intact et qu’on a l’impression de “manger autant qu’en temps normal”
- L’apparition d’un “goître” (un gonflement de la thyroide) ou d’un “nodule” (une petite boule ausein de la thyroide),
- Des battements de coeur trop accélérés
- Des palpitations, des tremblements, des muscles rigides
- Une sensation de fébrilité, de nervosité
- Une soif anormalement intense
- Des globes oculaires qui peuvent donner l’impression de “sortir des orbites”
- Des diarrhées
- Un ressenti “anormal” des températures (intolérance à la chaleur par exemple)
Comment diagnostique-t-on une hyperthyroïdie ?
Pour diagnostiquer une hyperthyroïdie, on commence par une prise de sang afin de mesurer votre TSH. En effet, la TSH est une hormone produite par une glande du cerveau nommée l’hypophyse, qui a pour rôle de donner à la thyroïde “l’ordre” de fabriquer la T4 et la T3. Si vous souffrez d’hyperthyroïdie, votre hypophyse sera donc alertée par le taux trop important de T4 et de T3 dans votre corps, et tentera de réagir en produisant moins de TSH. Le diagnostic d’hyperthyroïdie est donc posé lorsque la TSH est en-dessous d’un certain niveau.
Il est aussi possible qu’on mesure dans un second temps votre T4 et votre T3 pour évaluer le stade d’évolution de votre maladie, mais aussi votre cholestérol (sur lequel la T4 et la T3 agissent directement).
Si vous ne présentez pas une forme “typique” de la maladie, on peut aussi vous faire passer une échographie ou plus rarement un examen d’imagerie médicale appelé “scintigraphie” pour poser le meilleur diagnostique possible**.**
D’où vient l’hyperthyroïdie ?
La maladie de Basedow
Dans la plupart des cas, elle provient d’une maladie auto-immune (c’est-à-dire à une “attaque” du corps contre ses propres organes), la maladie de Basedow, qui touche surtout les femmes jeunes de moins de 60 ans, avec un pic entre 40 et 60 ans. A cause de la maladie de Basedow, les auto-anticorps stimulent anormalement la quantité d’hormones T3 et T4 dans l’organisme. La TSH considère alors qu’il y a suffisamment d’hormones dans l’organisme et cesse de fonctionner.
La prise de médicaments
La prise de certains médicaments peut provoquer une déréglement du taux d’hormones thyroïdiennes (notamment si l’on prend trop de lithium, ou certains traitements anticancéreux). Dans ce cas, on parle de thyrotoxicose, qui peut être dite “iatrogène” (due à un traitement médical) ou “factice” (due à une erreur, un accident, la prise de substances par soi-même…).
Inflammation de la thyroïde
Une inflammation de la thyroïde, qu’on appelle “thyroïdite”, qui peut provoquer soit une hyperthyroïdie, soit une hypothyroïdie (souvent l’une puis l’autre). Parmi les thyroïdites, on peut distinguer :
- La thyroïdite subaiguë de De Quervain, nom un peu “barbare” qui désigne en réalité une infection de la thyroïde due à un virus. La maladie commence le plus souvent avec des symptômes proches de ceux d’une grippe ; la thyroïde devient ensuite tendue, douloureuse, et le patient va le plus souvent connaître une hyperthyroïdie, puis une hypothyroïdie. Cette thyroïdite reste rare, se traite très bien (notamment avec des anti-inflammatoires), et finit par guérir relativement rapidement.
- La thyroïdite silencieuse, avec une thyroïdite qui gonfle, mais ici de façon indolore (d’où le nom “silencieuse”), à la suite d’une réaction auto-immune. Cette thyroïdite touche le plus souvent des femmes peu après leur accouchement (en général dans les trois à quatre mois suivant la grossesse, et jusqu’à douze mois après l’accouchement), et se manifeste elle aussi par une hyperthyroïdie, puis une hypothyroïdie. Cette maladie, là encore, est temporaire et se soigne bien.
D’autres causes
D’autres causes peuvent être à l’origine d’une hyperthyroïdie, parmi lesquelles :
- Une petite tumeur qu’on appelle “nodule toxique”
- Un goître (gonflement de la thyroïde) dit “toxique”, dû à une carence en iode ou à des facteurs génétiques
- Autres causes beaucoup plus rares : certains types de tumeurs ou de cancers (notamment des tumeurs au niveau de l’hypophyse ou de l’hypothalamus, des tumeurs des ovaires, ou un cancer de la thyroïde) peuvent mener à une hyperthyroïdie. En effet, l’hypophyse produit la TSH, l’hormone qui donne elle-même à la thyroïde “l’ordre” de fabriquer de la T3 et de la T4, et l’hypothalamus sert lui-même à stimuler l’hypophyse. Logiquement, si on a un problème au niveau de l’hypophyse ou de l’hypothalamus, le problème se répercutera sur la thyroïde. Dans ce cas, on parle d’hyperthyroïdie centrale (puisque liée au cerveau).
On vient de me diagnostiquer une hyperthyroïdie : que va-t-il se passer ?
Il est important de traiter l’hyperthyroïdie, puisqu’elle met votre corps en état de stress et peut notamment poser des problèmes pour votre coeur. Soyez rassuré cela dit : l’hyperthyroïdie peut ne pas être guérissable, mais elle reste toujours traitable et peut être contrôlée par des médicaments.
Différentes situations sont à distinguer :
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Si vous êtes atteint.e de la maladie de Basedow (comme dans la majorité des cas), vous ne pourrez pas guérir définitivement, et vous devrez suivre un traitement à vie. Pas d’inquiétude, vous vous verrez prescrire un traitement adapté :
- D’une part des bêta-bloquants, qui vont permettre de ralentir votre coeur, de diminuer votre production d’adrénaline et de “calmer” vos tremblements, et d’autre part des ATS (des médicaments dits “anti-thyroïdiens”) qui vont venir apaiser votre thyroïde.
- Vous aurez ensuite une consultation de suivi tous les deux à trois mois pour ajuster vos doses si besoin est. On peut le plus souvent arrêter le traitement au bout de douze à dix-huit mois, stade auquel la thyroïde a en général recommencé à fonctionner normalement mais ce n’est pas systématique.
- Si l’hyperthyroïdie persiste, on pourra vous prescrire de l’iode radioactif, qui va lui aussi venir se fixer sur la thyroïde et ralentir son fonctionnement (sauf si vous êtes enceinte ou cherchez à l’être, auquel cas l’iode radioactif pourrait être dangereux pour votre bébé).
- Enfin, en dernier recours, on pourra procéder à une opération chirurgicale pour retirer entièrement ou partiellement votre thyroïde. Cette opération rend cependant nécessaire la prise d’hormones thyroïdiennes tout au long de la vie, pour remplacer la thyroïde manquante.
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Si vous êtes atteint.e d’une thyroïdite, il s’agit en général d’une forme “temporaire” d’hyperthyroïdie, qui passe ensuite souvent par une phase d’hypothyroïdie avant de rentrer dans l’ordre. Votre médecin n’aura donc souvent pas besoin de vous prescrire de traitement particulier : il s’agira de vous suivre et de s’assurer que vous vous remettez bien, en vous prescrivant éventuellement des béta-bloquants pour vous soulager.
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Enfin, en cas d’hyperthyroïdie liée à un médicament, il suffira d’ajuster ou d’arrêter le traitement qui provoque vos problèmes de thyroïde.
On vous résume tout ici :
Maladie de Basedow | Thyroïdite | À cause des médicaments |
---|---|---|
Solution 1 : Prise de bêta-bloquants Solution 2 : Iode radioactif Solution 3 : Opération chirurgicale | Solution 1 : Pas de traitement particulier Solution 2 : Prise de bêta-bloquants | Arrêter le traitement |
Consultations tous les 2-3 mois pendant 12 à 18 mois | 1 consultation + suivi potentiel | 1 consultation |
Comment vit-on avec une hyperthyroïdie ?
Le repos
La première et la plus importante des recommandations qu’on peut vous faire reste le repos. Votre corps est fatigué, tourne à plein régime malgré lui : prenez le temps de dormir, de souffler autant que possible.
L’alimentation
Au niveau de l’alimentation, quelques ajustements sont souvent nécessaires, d’autant plus si vous avez perdu beaucoup de poids. N’hésitez pas à consulter un.e nutritionniste pour déterminer s’il est nécessaire de manger de façon un peu plus riche et mettre le nouveau régime en place si nécessaire.
De façon générale, il vous sera recommandé de :
- Mangez des repas équilibrés moins copieux et plus nombreux, pour mieux réguler et ressentir votre appétit.
- N’oubliez pas les féculents à chaque repas pour éviter que votre organisme aille trop puiser dans ses réserves et que vous continuez à perdre du poids.
- Consommez des aliments riches en calcium : des amandes, 2 à 3 laitages par jour, des légumes verts, des sardines entières voir de l’eau riche en calcium .
- Évitez les aliments trop salés ou les algues, puisqu’ils contiennent beaucoup d’iode et que l’iode joue un rôle direct sur la thyroïde, et pourrait donc interagir avec votre traitement ;
- Dans la même logique, si vous preniez un complément alimentaire en iode, il faudra sans doute l’interrompre : discutez-en avec votre médecin ;
- Évitez la caféine, qui renforcerait encore votre fébrilité et augmente la dépense energétique (on en trouve dans le café, mais aussi dans le thé noir ou dans la plupart des sodas, boissons énergisantes…).
Activité physique et hygiène de vie
Certains changements pourraient être nécessaires au niveau de votre hygiène de vie :
- Évitez de pratiquer un sport trop intense pour le coeur, qui est déjà sur-sollicité par votre hyperthyroïdie. Privilégier des activités physiques d’intensité modérée comme la marche ou la natation ;
- Pensez d’ores et déjà à votre pratique sportive durant et après le traitement : il sera en effet important pour vous de vous maintenir en bonne forme physique, puisque votre hyperthyroïdie risque de fragiliser votre squelette et vos articulations ;
- Prenez soin de vos yeux, eux aussi fragilisés par l’hyperthyroïdie : évitez les lumières trop vives, portez des lunettes de soleil adaptées si besoin et pensez à consulter votre ophtalmologue si les symptômes d’irritation persistent.
- A noter également : si vous êtes fumeur ou fumeuse, il sera important d’arrêter votre consommation de tabac, car celui-ci peut avoir un rôle perturbateur pour la thyroïde. De même, si vous souffrez d’un stress important, ou si vous êtes exposé.e à des perturbateurs endocriniens (par exemple via des produits chimiques, industriels, alimentaires…), veillez à en parler à votre médecin, car ces deux facteurs influencent aussi le fonctionnement de votre thyroïde.
Soyez donc rassuré.e : l’hyperthyroïdie est certes une maladie dont les symptômes peuvent paraître impressionnants ou inquiétants, d’autant plus qu’on ne peut pas la prévenir et qu’il n’y a pas de facteurs de risque évidents. En revanche, on sait très bien la traiter, et il existe différents moyens déjà bien éprouvés de parvenir à réguler le fonctionnement de votre thyroïde pour reprendre un quotidien normal !
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